« L’Appel du néant » de Maxime Chattam

Comme à mon habitude, à peine ai-je terminé un roman que j’en rédige la critique ! Après tout, il vaut mieux en parler tant que c’est encore frais…

Cette semaine, je vous présente L’Appel du néant de Maxime Chattam. J’avais tant entendu parler de cet auteur, tant vu ses livres sur des affiches placardées un peu partout, qu’il fallait que je me fasse ma propre idée du phénomène Chattam !

On avait pris soin de m’avertir au préalable : il faut avoir le cœur bien accroché pour lire ses œuvres. On m’avait dit vrai, mais j’y reviendrai un peu plus bas.

Les quelques lignes faisant office de résumé en quatrième de couverture m’ont tout de suite donné envie :

« Tueur en série…
Traque infernale.
Médecine légale.
Services secrets.
… Terrorisme.
La victoire du Mal est-elle inéluctable ?
Ce thriller va détruire vos nuits et hanter vos jours. »

Dans un premier temps, j’ai tout de même trouvé ce « résumé » un peu trop concis : un simple aperçu des thèmes traités dans le roman, mais pas d’ancrage dans l’intrigue. Malgré tout, cela a suscité mon intérêt. À présent, je trouve que ces quelques lignes correspondent tout à fait à l’atmosphère du roman et qu’elles sont efficaces dans leur rôle d’en donner un avant-goût.

L’histoire débute lorsque le cadavre d’un homme est retrouvé sur une voie de RER. Le train n’a pas pu l’éviter : on le retrouve en morceaux et, de surcroît, il présente des caractéristiques pour le moins incongrues : ongles collés par-dessus les siens, cheveux étrangers emmêlés dans sa propre chevelure, sans oublier la quantité de drogue retrouvée près de lui.

C’est Ludivine, lieutenant à la SR (Section de Recherches de la Gendarmerie nationale), et Marc Tallec, de la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure) qui se mettent alors en quête du meurtrier qui, visiblement, n’en est pas à son coup d’essai puisqu’aucune trace de lui n’est retrouvée sur le corps passé à la Javel, ni sur le lieu du crime. Tel est le début d’une enquête trépidante de 500 pages

Tout au long du roman, l’histoire avance sans longueur, rien ne traîne. Ce livre se lit à merveille, il s’agit d’un page-turner qui fait très bien son boulot, croyez-moi ! Sans vous en dire trop, il tourne autour du terrorisme et l’on y arrive rapidement une fois l’intrigue amorcée. Maxime Chattam nous présente un tas d’institutions relatives au monde du crime comme la DGSI précédemment citée et bien d’autres encore que je ne saurais pas vous citer dans l’immédiat, mais en tout cas, il le fait de façon claire et efficace, ce qui fait qu’une personne n’ayant pas de connaissances dans le domaine — je suis l’une d’entre elles — est tout à fait capable de comprendre tout ce qui se passe dans L’Appel du néant.

Puisque je ne souhaite pas vous dévoiler le reste de l’intrigue, je vais me contenter de développer un peu davantage sur le thème principal du livre qui est, comme je l’écrivais plus haut, le terrorisme. J’ai trouvé le sujet extrêmement bien traité. Maxime Chattam nous donne en quelque sorte une « vision d’ensemble » du djihad en adoptant plusieurs points de vue : celui des autorités (qui est le point de vue principal) et celui des djihadistes. En alternant au gré des chapitres entre l’un et l’autre et ces deux points de vue, Maxime Chattam met en relief la différence profonde qu’il y a entre nos convictions sans pour le moins donner ne serait-ce qu’un semblant raison aux terroristes, comme il le précise bien en postface : « Je voulais qu’on puisse comprendre [le terroriste], ses failles béantes qui expliquent beaucoup de choses, montrer que même les monstres sont avant tout des êtres humains qui s’effondrent, raconter cette rupture, mais pas aller jusqu’à [leur] donner raison, ne serait-ce qu’un tout petit peu ». Nous nous plongeons alors de temps à autre dans la tête du terroriste afin de nous rendre compte que pour lui, ses actes sont totalement justifiés et lui apparaissent comme étant logiques et « naturels ». Comme le rappelle le narrateur tout au long du livre, un terroriste ne se considère pas en tant que tel ; au contraire, il se considère comme un soldat de Dieu, en tant que martyr. Naturellement, nous ne pouvons pas partager cette vision des choses, étant des êtres rationnels (je l’espère…) contrairement aux djihadistes. Toutefois, cette alternance de point de vue est extrêmement intéressante et permet d’exposer deux réalités opposées.

Arrivé à la moitié du livre, je dois vous avouer que je ne comprenais pas complètement la dernière ligne de la quatrième de couverture : « Ce thriller va détruire vos nuits et hanter vos jours ». Même si certaines scènes décrites sont absolument terribles, « gores », comme on dit, et vont au-delà de toutes les horreurs que l’on pourrait imaginer, je ne serais pas allé jusqu’à dire que mes jours et mes nuits seraient hantés par ce livre. Puis j’ai compris. Outre le gore et toute l’horreur visuelle du roman, Maxime Chattam dépeint dans L’Appel du néant un monde effrayant qui crée le malaise ; un monde manipulé par les terroristes qui anticipent nos réactions et qui réussissent à obtenir ce qu’ils veulent, notamment en nous poussant vers le rejet de l’Islam et en embourbant les pays dans l’extrême droite. L’auteur nous expose des réalités difficiles à digérer et c’est cela qui nous fait réellement cauchemarder. Les dictatures, constate-t-il, sont les seuls régimes qui résistent bien au terrorisme. Ainsi, les citoyens se tournent vers les partis des extrêmes et sont prêts à mettre de côté leurs libertés individuelles pour retrouver la sérénité. Constat vrai et éclairant.

Je me permets de citer un paragraphe qui m’a particulièrement marqué dans ce roman et qui m’a fait prendre conscience de l’étrangeté de notre vie quotidienne :

« Nous vivons en état de siège permanent, mais nous nous y habituons. L’armée patrouille dans nos rues, nos gares, surveille nos écoles ; nous sommes fouillés dès que nous voulons nous rassembler quelque part, mais c’est devenu presque normal à nos yeux. Nous savons que ça peut péter à tout moment, la menace est omniprésente, on n’y pense dans le métro, les fêtes publiques ou les trains, dans les magasins. Au début la peur était là, bien viscérale pour la plupart d’entre nous, puis nous nous sommes adaptés, exactement comme des gens en état de guerre. Nous vivons avec. L’homme a une faculté surprenante à se faire à tout. Notre vie est celle d’un monde en guerre. Notre vocabulaire aussi. Même les terroristes parlent d’eux comme de résistants face à l’occupation occidentale… »

Comme c’est vrai, tout cela ! Jusqu’à ce jour, je ne m’étais pas rendu compte que nous étions à ce point accoutumés à l’état de guerre (car le narrateur insiste sur le fait que c’en est une). Je suis moi aussi impressionné par la capacité qu’a l’humain à s’adapter à son environnement.

Pour en revenir à l’intrigue, j’ai été tenu en haleine jusqu’au bout. Les cent dernières pages sont à couper le souffle, et je ne parle pas des vingt dernières… Je ne savais plus où donner de la tête, les évènements se précipitaient et des bouleversements s’opéraient si rapidement que mes yeux sautaient des paragraphes sans que je pusse les en empêcher, afin de savoir ce qui allait se passer ensuite ! Sincèrement, le dénouement était intense.

Pour terminer, je me confesse : avant de découvrir Maxime Chattam, j’avais un a priori. Je m’attendais à une histoire plus ou moins bien rodée avec pas mal de clichés au niveau du style d’écriture et beaucoup de gore pour faire sensation. Finalement, j’ai trouvé tout autre chose : un roman certes cru et qui rassasie notre soif de sensationnel sans que cela soit un prétexte pour écrire un livre. Maxime Chattam n’écrit pas à partir du gore ; il l’exploite dans son intrigue.

J’aimerais nuancer mon propos et contrebalancer mon engouement avec autre chose que j’aurais moins aimé dans ce livre, mais même en cherchant bien, je n’arrive pas à mettre le doigt sur un point négatif majeur dans L’Appel du néant. Je vais donc tout simplement vous le recommander vivement et vous conseiller ce lien redirigeant vers sa fiche sur le site des éditions Albin Michel, que je remercie chaleureusement de m’avoir très gentiment fait parvenir un exemplaire de L’Appel du néant.

À très bientôt pour une nouvelle critique !

 


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